L’Actu de BGE Yvelines

Qualité de Vie au Travail (QVT) et emploi durable dans l’ESS... et ailleurs ?

En 2016, la mutuelle CHORUM* a lancé la 2ème édition de son baromètre national sur la QVT dans l’ESS. Cette enquête était ouverte à toutes les structures de l’ESS : associations, coopératives, mutuelles, fondations et entreprises d’utilité sociale.

Les résultats ont été publiés le 7 mars, et présentés lors d’un événement organisé en deux temps : la matinée était dédiée aux résultats et enseignements du baromètre et l’après-midi avait pour but d’ouvrir la réflexion sur les possibilités de création d’emplois « durables, pérennes et épanouissants », dans l’ESS et au-delà.
Les différentes transitions en cours impactant l’emploi et le travail ont été abordées : transition démographique, écologique, numérique, démocratique, etc…
Retour sur deux grands thèmes discutés cette après-midi-là :
- La transition démographique et écologique
Pierre-Henri Tavoillot, maître de conférences en Philosophie et Isabelle Delannoy, ingénieur agronome ont croisé leurs regards sur ces deux transitions en cours.
M Tavoillot a répondu avec humour au titre de son livre « La guerre des âges aura-t-elle lieu ? », par un « Non » très affirmé. En effet, pour cet auteur, les liens entre générations paraissent se distendre mais pas seulement. La solidarité intergénérationnelle n’est certes plus une injonction sociale indépassable, et chacun peut vaquer de manière individualiste à son avenir. Mais l’on voit apparaître des formes de solidarité choisies. La question qu’il nous invite alors à se poser est plutôt « Pourquoi dans une société hyper-individualiste, il reste encore de la solidarité ? ». L’enjeu est alors de comprendre ce mécanisme de solidarité et de le renforcer.
Mme Delannoy a présenté son concept d’économie symbiotique, qui vise à clarifier et faire comprendre les principes des modèles économiques durables, dont fait partie pour elle l’ESS. Ceci lui a permis de revenir sur l’économie dite collaborative, qui voit se développer des formes de travail extrêmement précarisées, comme chez Uber. Ces réseaux de makers fournissent parfois des formes de travail non durable, au sens où elles épuisent les ressources humaines, sans perspective de développement humain. La limite est franchie lorsque la gouvernance n’est pas exercée par les opérateurs et la plus-value ne leur est pas redistribuée. L’objectif d’une économie réellement collaborative est de « posséder en commun ce que l’on produit en commun », en référence au concept de communs. De plus en plus, le terme biens communs est remplacé par celui de communs afin d'éviter la confusion induite par le terme biens qui renvoie à une notion de propriété et pour mettre les actions collectives au même niveau que la ressource.

Pour en savoir plus :
- Livre de P-H Tavoillot 

- Document de synthèse d’Isabelle Delannoy - « L’économie symbiotique une voie nouvelle pour l’humanité » 

- La transition numérique et le travail
Geneviève Bouché, docteur en Sciences de l’organisation et futurologue et Sandrino Graceffa, directeur de SMart Belgique se sont exprimés sur l’avenir du travail, dans un contexte de numérisation exponentielle des activités humaines.
Pour Mme Bouché, le numérique va rapidement réaliser à la fois les tâches répétitives et les tâches très complexes. Il restera aux humains les tâches décisionnelles, créatives et empathiques. Des études diverses indiquent que cela réduira du quart à la moitié la quantité totale de travail, dans les prochaines années. De plus une reconfiguration de la mondialisation est en cours, qui oriente les échanges internationaux, vers les matières premières et les produits d’exception. Dans ce contexte, l’économie contributive pourra être une opportunité.
De même pour M Graceffa, la transition numérique invite à reconsidérer le travail, au-delà de la question de l’emploi. Depuis 3-4 ans, l’emploi dans sa forme classique, notamment en CDI commence à diminuer au profit des nouvelles formes d’emploi, avec le développement de formes de plus en plus précarisées d’auto-emploi. Le modèle social perd là de sa cohérence et les personnes se retrouvent alors peu prémunies contre les risques d’accidents de la vie. Cela devient inacceptable lorsque ce sont par exemple de jeunes coursiers à vélo qui sont payés à la tâche, prennent des risques extrêmes dans la circulation automobile… et ne seront pas bénéficiaires d’un arrêt de travail en cas d’accident. Uber a réussi à prolétariser une profession qui était auparavant indépendante (les chauffeurs de taxis), en supprimant une grande partie de leurs marges de manœuvre, de leurs possibilités de choix (et donc de réalisation) dans leur travail. SMart tente de faire l’inverse, et permet à ses membres de préserver leur autonomie de travail, en adossant leur statut à celui de salarié. En effet, de nos jours, c’est encore ce statut qui permet d’accéder à un maximum de sécurité sociale, dans les pays où SMart est implanté.

Pour en savoir plus :
- Sur l’économie contributive

- La coopérative SMart

- Livre de Sandrino Graceffa : Refaire le monde du travail, une alternative à l’ubérisation

* La Mutuelle CHORUM et le CIDES
La mutuelle CHORUM est la seule mutuelle entièrement dédiée aux acteurs de l’ESS. Depuis 10 ans, elle porte un centre de ressources et d’action, le CIDES, qui vise la prévention des risques professionnels et le développement de la santé et de la qualité de vie au travail.
Plus d’informations
Pour en savoir plus sur les résultats du baromètre et voir ou revoir les conférences du 7 mars

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